Cours 2°- Les incipit du roman

LES DEBUTS DE ROMAN

Qu’est-ce qu’un incipit ? Quel est son rôle ?

Définition : Incipit vient du latin incipio, is, ere « commencer » et signifie les premiers mots d’un texte.

Il permet au lecteur de pénétrer dans le « quasi-monde » du texte créé par l’auteur. Donc d’entrer dans un monde qui n’existe pas encore.C’est un lieu stratégique du texte.

Il doit à la fois informer et intéresser.

Le début du roman (ou de la nouvelle) est donc traditionnellement destiné à répondre aux questions : Qui ? Quand ? Où ? Quoi ? Comment ?

L’Incipit peut marquer à la fois le début d’une vie et le début d’une intrigue. (Le livre et les évènements commencent en même temps)

Mais quelquefois, quand le roman commence, l’histoire, elle, a déjà commencé : c’est un début « in media res » (« Au milieu des choses)

Ainsi dans le texte de Zola, Germinal, (L.A 3) le lecteur découvre un personnage en train de marcher sur une route, par une nuit glaciale. Le lecteur ne sait pas qui est cet homme ni ce qu’il fait là.

Certains auteurs jouent avec les codes de l’incipit et cherchent à surprendre le lecteur. Il s’agit de déconcerter le lecteur. C’est le cas dans l’incipit de Jacques le fataliste de Diderot (XVIII°) :

« Comment s’étaient-ils rencontrés ? Par hasard, comme tout le monde. Comment s’appelaient-ils ? Que vous importe? D’où venaient-ils ? Du lieu le plus prochain. Où allaient-ils ? Est-ce que l’on sait où l’on va? Que disaient-ils ? Le maître ne disait rien ; et Jacques disait que son capitaine disait que tout ce qui nous arrive de bien et de mal ici-bas était écrit là-haut »

Dans La Modification de Michel Butor au XX° :

« Vous avez mis le pied gauche sur la rainure de cuivre, et de votre épaule droite vous essayez en vain de pousser un peu plus le panneau coulissant.

Vous vous introduisez par l’étroite ouverture en vous frottant contre ses bords, puis, votre valise couverte de granuleux cuir sombre couleur d’épaisse bouteille, votre valise assez petite d’homme habitué aux longs voyages, vous l’arrachez par sa poignée collante, avec vos doigts qui se sont échauffés, si peu lourde qu’elle soit, de l’avoir portée jusqu’ici, vous la soulevez et vous sentez vos muscles et vos tendons se dessiner non seulement dans vos phalanges, dans votre paume, votre poignet et votre bras, mais dans votre épaule aussi, dans toute la moitié du dos et dans vos vertèbres depuis votre cou jusqu’aux reins.

Néanmoins, l’incipit doit donner un certain nombre d’informations :

QUI ?

QUI ?

Le narrateur :

  • Qui parle ?
  • Personnage du roman ou non ?
  • Est-il présent dés le début ?
  • Quelle est la focalisation choisie ? (Interne, externe, zéro ?)

Le personnage :

Détails donnés immédiatement sur lui de manière claire ou énigmatique.

  • Un jeune homme sans nom dans Le Chef-d’œuvre inconnu de Balzac.
  • Un ouvrier au chômage dans Germinal de Zola
  • Un narrateur-personnage qui dit « je » au début de L’Etranger de Camus…

QUAND ? OU ?

Le lieu et le temps (informations spatio-temporelles)

Où :

Type d’espace :

  • Réel ?
  • Symbolique ?

Quand :

  • Temps du calendrier : une date
  • Temps de l’Histoire : une époque
  • Temps romanesque : une saison, un moment du jour, de la nuit…

Respect des conventions d’ouverture ?

  • Y-a-t-il des écarts par rapport à la tradition du genre ?
  • En quoi le passage se détache-t-il de la forme traditionnelle du genre ?
  • Relier le texte au mouvement littéraire auquel il appartient.
  • Créer l’effet de réel ou au contraire exhiber la fiction ?

Types d’incipit :

  • Type dramatique :

A une époque et dans un lieu donné, quelqu’un fait ou a fait quelque chose…(Souvent un incipit « in media res ») :

« Je vais encourir bien des reproches. Mais qu’y puis-je ? Est-ce ma faute si j’eus douze ans quelques mois avant la déclaration de la guerre ? Sans doute, les troubles qui me vinrent de cette période extraordinaire furent d’une sorte qu’on n’éprouve jamais à cet âge ; mais comme il n’existe rien d’assez fort pour nous vieillir malgré les apparences, c’est en enfant que je devais me conduire dans une aventure où déjà un homme eût éprouvé de l’embarras. Je ne suis pas le seul. Et mes camarades garderont de cette époque un souvenir qui n’est pas celui de leurs aînés. Que ceux qui déjà m’en veulent se représentent ce que fut la guerre pour tant de très jeunes garçons : quatre ans de grandes vacances. »

  • Type discursif :

Une voix parle, celle d’un narrateur qui s’adresse au lecteur.

Stendhal, La Chartreuse de Parme :

« Le 15 mai 1796, le général Bonaparte fit son entrée dans Milan à la tête de cette jeune armée qui venait de passer le pont de Lodi, et d’apprendre au monde qu’après tant de siècles César et Alexandre avaient un successeur. Les miracles de bravoure et de génie dont l’Italie fut témoin en quelques mois réveillèrent un peuple endormi… »

  • Type descriptif :

Le texte s’ouvre par une description qui suspend l’action et met le lecteur en état d’attente. (Incipit statique) :

« La petite ville de Verrières peut passer pour l’une des plus jolies de la Franche-Comté. Ses maisons blanches avec leurs toits pointus de tuiles rouges, s’étendent sur la pente d’une colline, dont des touffes de vigoureux châtaigniers marquent les moindres sinuosités. Le Doubs coule à quelques centaines de pieds au-dessous de ses fortifications, bâties jadis par les Espagnols, et maintenant ruinées. »

  • Type suspensif :

Il donne peu d’informations et cherche à dérouter le lecteur. C’est le cas dans La Modification de M. Butor (XX°-Nouveau roman)

« Vous avez mis le pied gauche sur la rainure de cuivre, et de votre épaule droite vous essayez en vain de pousser un peu plus le panneau coulissant.

Vous vous introduisez par l’étroite ouverture en vous frottant contre ses bords, puis, votre valise couverte de granuleux cuir sombre couleur d’épaisse bouteille, votre valise assez petite d’homme habitué aux longs voyages, vous l’arrachez par sa poignée collante, avec vos doigts qui se sont échauffés, si peu lourde qu’elle soit, de l’avoir portée jusqu’ici, vous la soulevez et vous sentez vos muscles et vos tendons se dessiner non seulement dans vos phalanges, dans votre paume, votre poignet et votre bras, mais dans votre épaule aussi, dans toute la moitié du dos et dans vos vertèbres depuis votre cou jusqu’aux reins ».

Fonctions

Fonctions :

  • Fonction informative : il a une valeur d’annonce et programme la suite du texte.
  • Fonction séductrice : il doit accrocher et séduire le lecteur, faire naitre un « horizon d’attente ». L’attention et la curiosité du lecteur doit être stimulée qqsoit le type employé.
  • Fonction de pacte : l’incipit par les choix de l’auteur propose un « pacte de lecture » et annonce le genre auquel le texte appartient.

Topos

Topos (Quelques modèles) :

  • Topos de l’inconnu : personnage dont on perce peu à peu l’anonymat.
  • Topos du novice : Personnage placé dans un milieu nouveau pour lui.
  • Topos de la rencontre : Novice rencontre un personnage qui sait, qui peut l’initier..

LES LECTURES ANALYTIQUES

L.A 1 : Balzac, Le Chef-d’œuvre inconnu, 1831

Balzac (Honoré de)- (1799-1850)

Romancier, dramaturge, critique littéraire, critique d’art, essayiste, journaliste et imprimeur, il a laissé l’une des plus imposantes œuvres romanesques de la littérature française, avec 93 romans et nouvelles parus de 1829 à 1855, réunis sous le titre La Comédie humaine.

Le Chef d’œuvre inconnu est une nouvelle de Balzac parue en 1831 qui sera plus tard intégrée à La Comédie humaine

Un jeune peintre arrive chez un maitre pour y découvrir le secret de la peinture… Le Chef-d’œuvre inconnu constitue une réflexion sur l’art et la création.

Le texte

A un lord

…………………

…..………………

……………………

I

Gillette

Vers la fin de l’année 1612, par une froide matinée de décembre, un jeune homme dont le vêtement était de très mince apparence, se promenait devant la porte d’une maison située rue des Grands-Augustins, à Paris. Après avoir assez longtemps marché dans cette rue avec l’irrésolution d’un amant qui n’ose se présenter chez sa première maîtresse, quelque facile qu’elle soit, il finit par franchir le seuil de cette porte, et demanda si maître François PORBUS était en son logis. Sur la réponse affirmative que lui fit une vieille femme occupée à balayer une salle basse le jeune homme monta lentement les degrés, et s’arrêta de marche en marche, comme quelque courtisan de fraîche date, inquiet de l’accueil que le roi va lui faire. Quand il parvint en haut de la vis, il demeura pendant un moment sur le palier, incertain s’il prendrait le heurtoir qui ornait la porte de l’atelier où travaillait sans doute le peintre de Henri IV délaissé pour Rubens par Marie de Médicis . /Le jeune homme éprouvait cette sensation profonde qui a dû faire vibrer le cœur des grands artistes quand, au fort de la jeunesse et de leur amour pour l’art, ils ont abordé un homme de génie ou quelque chef- d’œuvre. Il existe dans tous les sentiments humains une fleur primitive, engendrée par un noble enthousiasme qui va toujours faiblissant jusqu’à ce que le bonheur ne soit plus qu’un souvenir et la gloire un mensonge. Parmi ces émotions fragiles, rien ne ressemble à l’amour comme la jeune passion d’un artiste commençant le délicieux supplice de sa destinée de gloire et de malheur, passion pleine d’audace et de timidité, de croyances vagues et de découragements certains. À celui qui léger d’argent, qui adolescent de génie, n’a pas vivement palpité en se présentant devant un maître, il manquera toujours une corde dans le cœur, je ne sais quelle touche de pinceau, un sentiment dans l’œuvre, une certaine expression de poésie. Si quelques fanfarons bouffis d’eux-mêmes croient trop tôt à l’avenir, ils ne sont gens d’esprit que pour les sots. À ce compte, le jeune inconnu paraissait avoir un vrai mérite, si le talent doit se mesurer sur cette timidité première, sur cette pudeur indéfinissable que les gens promis à la gloire savent perdre dans l’exercice de leur art, comme les jolies femmes perdent la leur dans le manège de la coquetterie. L’habitude du triomphe amoindrit le doute, et la pudeur est un doute peut- être.

Accablé de misère et surpris en ce moment de son outrecuidance , le pauvre néophyte ne serait pas entré chez le peintre auquel nous devons l’admirable portrait de Henri IV, sans un secours extraordinaire que lui envoya le hasard.

L.A 2 : Zola, Germinal, 1885

Emile Zola

Bio en vidéo

Le texte

Germinal est publié en 1885, et fait partie des Rougon-Macquart (Recueil de 20 romans dans lesquels on retrouve les mêmes personnages et leur descendance)

Roman de la lutte des classes et de la révolte sociale, Germinal traite de la vie des mineurs dans une France en pleine industrialisation. Roman naturaliste

Fils de Gervaise Macquart et de son amant Lantier, le jeune Etienne Lantier s’est fait renvoyer de son travail pour avoir donné une gifle à son employeur. Chômeur, il part, en pleine crise industrielle, dans le Nord de la France, à la recherche d’un nouveau emploi.

Dans la plaine rase, sous la nuit sans étoiles, d’une obscurité et d’une épaisseur d’encre, un homme suivait seul la grande route de Marchiennes à Montsou, dix kilomètres de pavé coupant tout droit, à travers les champs de betteraves. Devant lui, il ne voyait même pas le sol noir, et il n’avait la sensation de l’immense horizon plat que par les souffles du vent de mars, des rafales larges comme sur une mer, glacées d’avoir balayé des lieues de marais et de terres nues. Aucune ombre d’arbre ne tachait le ciel, le pavé se déroulait avec la rectitude d’une jetée, au milieu de l’embrun aveuglant des ténèbres.

L’homme était parti de Marchiennes vers deux heures. Il marchait d’un pas allongé, grelottant sous le coton aminci de sa veste et de son pantalon de velours. Un petit paquet, noué dans un mouchoir à carreaux, le gênait beaucoup ; et il le serrait contre ses flancs, tantôt d’un coude, tantôt de l’autre, pour glisser au fond de ses poches les deux mains à la fois, des mains gourdes que les lanières du vent d’est faisaient saigner. Une seule idée occupait sa tête vide d’ouvrier sans travail et sans gîte, l’espoir que le froid serait moins vif après le lever du jour. Depuis une heure, il avançait ainsi, lorsque sur la gauche, à deux kilomètres de Montsou, il aperçut des feux rouges, trois brasiers brûlant au plein air, et comme suspendus. D’abord, il hésita, pris de crainte ; puis, il ne put résister au besoin douloureux de se chauffer un instant les mains.

Germinal, le film

L.A 3 : Mauriac, Thérèse Desqueyroux, 1927

François Mauriac, ( 1885 – 1970) est un écrivain français. Lauréat du Grand prix du roman de l’Académie française en 1926, il est élu membre de l’Académie française. Il reçoit le prix Nobel de littérature en 1952.

Son œuvre romanesque révèle un analyste des passions de l’âme et un critique de la bourgeoisie provinciale (Genitrix, Le Désert de l’amour, Thérèse Desqueyroux, Le Nœud de vipères… La plupart de ses romans évoquent le conflit entre la foi et la chair, et développent plusieurs images récurrentes comme le « désert » spirituel que ses personnages doivent traverser.

Pour éviter le scandale et protéger les intérêts de leur fille, Bernard Desqueyroux, que sa femme Thérèse a tenté d’empoisonner son mari, Bernard. Au début du roman, elle vient de bénéficier d’un non-lieu et quitte le palais de Justice

Texte

L’avocat ouvrit une porte. Thérèse Desqueyroux, dans ce couloir dérobé du palais de justice, sentit sur sa face la brume et, profondément, l’aspira. Elle avait peur d’être attendue, hésitait à sortir. Un homme, dont le col était relevé, se détacha d’un platane, elle reconnut son père.

L’avocat cria __ << Non-lieu >> et, se retournant vers Thérèse : __ << Vous pouvez sortir, il n’y a personne. >>

Elle descendit des marches mouillées. Oui, la petite place semblait déserte. Son père ne l’embrassa pas, ne lui donna pas même un regard ; il interrogeait l’avocat Duros qui répondait à mi-voix, comme s’ils eussent été épiés. Elle entendait confusément leurs propos :

__ << Je recevrai demain l’avis officiel du non-lieu.

__ Il ne peut plus y avoir de surprise ?

__ Non : les carottes sont cuites, comme on dit.

__ Après la déposition de mon gendre, c’était couru.

__ Couru… couru… On ne sait jamais.

__ Du moment que, de son propre aveu il ne comptait jamais les gouttes…

__ Vous savez, Larroque, dans ces sortes d’affaires, le témoignage de la victime… >>

La voix de Thérèse s’éleva : __ Il n’y a pas eu de victime.

__ J’ai voulu dire : victime de son imprudence, madame. >>

Les deux hommes, un instant, observèrent la jeune femme immobile, serrée dans son manteau, et ce blême visage, qui n’exprimait rien. Elle demanda où était la voiture ; son père l’avait fait attendre sur la route de Budos, en dehors de la ville, pour ne pas attirer l’attention. Ils traversèrent la place : des feuilles de platane étaient collées aux bancs trempés de pluie. Heureusement, les jours avaient bien diminué. D’ailleurs, pour rejoindre la route de Budos, on peut suivre les rues les plus désertes de la sous-préfecture. Thérèse marchait entre les deux hommes qu’elle dominait du front et qui de nouveau discutaient comme si elle n’eût pas été présente ; mais, gênés par ce corps de femme qui les séparait, ils le poussaient du coude. Alors elle demeura un peu en arrière, déganta sa main gauche pour arracher de la mousse aux vieilles pierres qu’elle longeait. Parfois un ouvrier à bicyclette la dépassait, ou une carriole ; la boue jaillie l’obligeait à se tapir contre le mur. Mais le crépuscule recouvrait Thérèse, empêchait que les hommes la reconnussent. L’odeur de fournil et de brouillard n’était plus seulement pour elle l’odeur du soir dans une petite ville : elle y retrouvait le parfum de la vie qui lui était rendue enfin ; elle fermait les yeux au souffle de la terre endormie, herbeuse et mouillée ; s’efforçait de ne pas entendre les propos du petit homme aux courtes jambes arquées qui, pas une fois, ne se retourna vers sa fille ; elle aurait pu choir au bord de ce chemin : ni lui, ni Duros ne s’en fussent aperçus. Ils n’avaient plus peur d’élever la voix.

__ « La déposition de M. Desqueyroux était excellente, oui. Mais il y avait cette ordonnance : en somme, il s’agissait d’un faux… Et c’était le docteur Pédemay qui avait porté plainte…

__ Il a retiré sa plainte…

__ Tout de même, l’explication qu’elle a donnée… cet inconnu qui lui remet une ordonnance… »

Thérèse, moins par lassitude que pour échapper à ces paroles dont on l’étourdissait depuis des semaines, ralentit en vain sa marche ; impossible de ne pas entendre le fausset de son père :

__ « Je le lui ai assez dit : “Mais, malheureuse, trouve autre chose… trouve autre chose… »

Bande annonce du film

L.A 4 : Camus, L’étranger, 1942

Bio en video

L’Etranger

Le texte

Aujourd’hui, maman est morte. Ou peut-être hier, je ne sais pas. J’ai reçu un télégramme de l’asile : « Mère décédée. Enterrement demain. Sentiments distingués. » Cela ne veut rien dire. C’était peut-être hier.

L’asile de vieillards est à Marengo, à quatre-vingts kilomètres d’Alger. Je prendrai l’autobus à deux heures et j’arriverai dans l’après-midi. Ainsi, je pourrai veiller et je rentrerai demain soir. J’ai demandé deux jours de congé à mon patron et il ne pouvait pas me les refuser avec une excuse pareille. Mais il n’avait pas l’air content. Je lui ai même dit : « Ce n’est pas de ma faute. » Il n’a pas répondu. J’ai pensé alors que je n’aurais pas dû lui dire cela. En somme, je n’avais pas à m’excuser. C’était plutôt à lui de me présenter ses condoléances. Mais il le fera sans doute après-demain, quand il me verra en deuil. Pour le moment, c’est un peu comme si maman n’était pas morte. Après l’enterrement, au contraire, ce sera une affaire classée et tout aura revêtu une allure plus officielle.

J’ai pris l’autobus à deux heures. Il faisait très chaud. J’ai mangé au restaurant, chez Céleste, comme d’habitude. Ils avaient tous beaucoup de peine pour moi et Céleste m’a dit : « On n’a qu’une mère. » Quand je suis parti, ils m’ont accompagné à la porte. J’étais un peu étourdi parce qu’il a fallu que je monte chez Emmanuel pour lui emprunter une cravate noire et un brassard. Il a perdu son oncle, il y a quelques mois.

J’ai couru pour ne pas manquer le départ. Cette hâte, cette course, c’est à cause de tout cela sans doute, ajouté aux cahots, à l’odeur d’essence, à la réverbération de la route et du ciel, que je me suis assoupi. J’ai dormi pendant presque tout le trajet. Et quand je me suis réveillé, j’étais tassé contre un militaire qui m’a souri et qui m’a demandé si je venais de loin. J’ai dit « oui » pour n’avoir plus à parler.

L’asile est à deux kilomètres du village. J’ai fait le chemin à pied. J’ai voulu voir maman tout de suite. Mais le concierge m’a dit qu’il fallait que je rencontre le directeur. Comme il était occupé, j’ai attendu un peu. Pendant tout ce temps, le concierge a parlé et ensuite, j’ai vu le directeur : il m’a reçu dans son bureau. C’était un petit vieux, avec la Légion d’honneur. Il m’a regardé de ses yeux clairs. Puis il m’a serré la main qu’il a gardée si longtemps que je ne savais trop comment la retirer. Il a consulté un dossier et m’a dit : « Mme Meursault est entrée ici il y a trois ans. Vous étiez son seul soutien. » J’ai cru qu’il me reprochait quelque chose et j’ai commencé à lui expliquer. Mais il m’a interrompu : « Vous n’avez pas à vous justifier, mon cher enfant. J’ai lu le dossier de votre mère. Vous ne pouviez subvenir à ses besoins. Il lui fallait une garde. Vos salaires sont modestes. Et tout compte fait, elle était plus heureuse ici. » J’ai dit : « Oui, monsieur le Directeur. » Il a ajouté : « Vous savez, elle avait des amis, des gens de son âge. Elle pouvait partager avec eux des intérêts qui sont d’un autre temps. Vous êtes jeune et elle devait s’ennuyer avec vous. »

C’était vrai. Quand elle était à la maison, maman passait son temps à me suivre des yeux en silence. Dans les premiers jours où elle était à l’asile, elle pleurait souvent. Mais c’était à cause de l’habitude. Au bout de quelques mois, elle aurait pleuré si on l’avait retirée de l’asile. Toujours à cause de l’habitude. C’est un peu pour cela que dans la dernière année je n’y suis presque plus allé. Et aussi parce que cela me prenait mon dimanche - sans compter l’effort pour aller à l’autobus, prendre des tickets et faire deux heures de route.

Albert CAMUS, L’Etranger, I, 1, 1942

L.A 5 : Germain, Magnus,

Sylvie Germain, née en 1954

Romancière, essayiste et dramaturge française contemporaine.

Au cours des années 70, Sylvie Germain suit des études de philosophie .

Elle commence à cette époque à écrire des contes et des nouvelles. Depuis presque trente ans, Sylvie Germain construit une oeuvre singulière, imposante et cohérente. Couronnée de nombreux prix littéraires : Prix Femina en 1989 pour Jours de colère, Grand Prix Jean Giono en 1998 pour Tobie des Marais, Prix Goncourt des lycéens en 2005 pour Magnus, Prix Jean Monnet de littérature européenne en 2012 et Grand Prix SGDL de littérature 2012 pour l’ensemble de son œuvre…

Le texte

Magnus est à la fois le nom de l’ours en peluche du héros et le nom que le héros, rebaptisé Franz-Georg, se donne à lui-même. Né avant la guerre en Allemagne, orphelin puis adopté, il est perturbé par ses origines et doit, après la guerre, supporter et comprendre son passé. Au début du roman, la narratrice précise son projet littéraire et évoque son travail d’écriture.

Ouverture

D’un éclat de météorite, on peut extraire quelques menus secrets concernant l’état originel de l’univers. D’un fragment d’os, on peut déduire la structure et l’aspect d’un animal préhistorique, d’un fossile végétal, l’ancienne présence d’une flore luxuriante dans une région à présent désertique. L’immémorial est pailleté de traces, infimes et têtues.

D’un lambeau de papyrus ou d’un morceau de poterie, on peut remonter vers une civilisation disparue depuis des millénaires. À partir de la racine d’un mot, on peut rayonner à travers une constellation de vocables et de sens. Les restes, les noyaux gardent toujours un infrangible[1] grain de vigueur.

Dans tous les cas, l’imagination et l’intuition sont requises pour aider à dénouer les énigmes.

D’un homme à la mémoire lacunaire, longtemps plombée de mensonges puis gauchie par le temps, hantée d’incertitudes, et un jour soudainement portée à incandescence, quelle histoire peut-on écrire ?

Une esquisse de portrait, un récit en désordre, ponctué de blancs, de trous, scandé d’échos, et à la fin s’effrangeant[2].

Tant pis pour le désordre, la chronologie d’une vie humaine n’est jamais aussi linéaire qu’on le croit. Quant aux blancs, aux creux, aux échos et aux franges, cela fait partie intégrante de toute écriture, car de toute mémoire. Les mots d’un livre ne forment pas davantage un bloc que les jours d’une vie humaine, aussi abondants soient ces mots et ces jours, ils dessinent juste un archipel de phrases, de suggestions, de possibilités inépuisées sur un vaste fond de silence. Et ce silence n’est ni pur ni paisible, une rumeur y chuchote tout bas, continument. Une rumeur montée des confins du passé pour se mêler à celle affluant de toutes parts du présent. Un vent de voix, une polyphonie de souffles.

En chacun la voix d’un souffleur murmure en sourdine, incognito — voix apocryphe[3] qui peut apporter des nouvelles insoupçonnées du monde, des autres et de soi-même, pour peu qu’on tende l’oreille.

Écrire, c’est descendre dans la fosse du souffleur pour apprendre à écouter la langue respirer là où elle se tait, entre les mots, autour des mots, parfois au cœur des mots.

[1] Qui ne peut être détruit.

[2] Se déchiquetant.

[3] Qui n’est pas authentique.

Œuvre cursive

Dai Sijie, Balzac et la petite tailleuse chinoise , 2000 , ( Edition Belin, BiblioLycée)

- Recherche sur cette époque de la Révolution Chinoise par les élèves

- Qui est D. Sijie ?

L’auteur

Dai Sijie est né en 1954 , en Chine.

En 1966, c’est le début de la Révolution culturelle chinoise voulue par Mao et le PCC (Parti Communiste Chinois).

Cette « révolution » consistera essentiellement à éliminer tout ce qui pourrait remettre en cause le pouvoir : la culture traditionnelle ou occidentale doivent être éradiquées…

Une véritable chasse aux intellectuels et aux « bourgeois » commence alors et durera jusqu‘en 1976, à la mort de Mao Zedong. Livres interdits, temples détruits, des millions d’”intellectuels” emprisonnés ou envoyés dans des « camps ». C’est le cas des parents de Dai Sijie, médecins.

Il s’agit pour le pouvoir de pratiquer une “rééducation culturelle” particulièrement destinée aux jeunes « bourgeois ». On les envoyait dans des campagnes lointaines pour travailler aux champs et partager la vie des paysans.

Le jeune Dai Sijie était au collège lorsqu’il fut envoyé en rééducation, dans la province du Sichuan, au centre de la Chine. Il y restera trois ans, de 1971 à 1974.

C’est cette période qu’il reprend dans Balzac et la Petite Tailleuse Chinoise.

En 1976, Dai Sijie pourra entrer à l’université, pour y étudier l’art chinois. Il obtient une bourse pour étudier à l’étranger. Il est envoyé en France, où il choisit d’étudier le cinéma. A partir de 1984,il s’installe en France et entame des études à l’Institut des hautes études cinématographiques.

Son oeuvre

Balzac et la Petite Tailleuse Chinoise est traduit en vingt-cinq langues (dont le Chinois). Le roman reçoit de nombreux prix internationaux. Suivront Le Complexe de Di (2003, prix Femina), Par une nuit où la lune ne s’est pas levée (2007), l’Acrobatie aérienne de Confucius (2009), et Trois vies chinoises (2011).

Dai Sijie est également réalisateur : En 2002, il adapte lui-même Balzac et la Petite Tailleuse Chinoise. Puis Chine ma douleur (1989, prix Jean Vigo), Les Filles du botaniste (2006)…

Les thèmes

  1. Les relations : amitié, amour
  2. Le contexte politique et la critique du régime
  3. Le portrait de la société paysanne
  4. L’éloge de la littérature

Travaux d’écriture : vers l’invention

  • Ecrire une préface
  • Rédiger une critique
  • Imaginer une suite (Lettre que reçoit Luo de la Petite tailleuse plusieurs années après)

DOCUMENTS COMPLEMENTAIRES

QUIZ SUR LE ROMAN

Entrainement EAF

Questions de corpus

Outils :

  • Rappel méthodologique corpus
  • Tableau question corpus
  • Correction du corpus
  • Fiche d’auto évaluation sur le corpus

La méthode…

Un « corpus » est un ensemble de textes (trois à quatre textes en général).

« La réponse à une question portant sur un corpus de textes doit être synthétique, et s’appuyer sur quelques citations bien choisies montrant que l’ensemble des textes a été étudié ».

Les questions sur corpus ont deux objectifs principaux :


  • Faire remarquer les différences ou les points communs entre les textes
  • Préparer l’exercice d’écriture(invention, commentaire, dissertation)

Dans les séries technologiques, il y a généralement deux questions sur corpus, sur 6 points (généralement 3 pts + 3 pts).
Sur les 4 heures d’épreuve, il est conseillé de ne pas consacrer plus d’ 1h/ 1h 15 à ces questions.

COMMENT S’Y PRENDRE…

  1. Lire attentivement les questions :
  • Soit elles interrogent sur les points communs entre les textes,
  • Soit sur les différences.

Identifier le type de réponse attendu (réponse type “points communs” ou réponse type “différences” ?)

  1. Lire les textes en surlignant au stabilo les éléments qui permettront de répondre aux questions : une couleur par question.

  1. Construire un tableau de synthèse, un texte par colonne


Noter sur une même ligne les éléments communs entre les textes, de manière à organiser plus facilement la réponse.

  1. Rédiger une intro qui présente rapidement les textes (auteur, source) et la question. Votre intro peut commencer ainsi : «Le corpus que nous devons étudier est composé de trois textes, le premier est de… »

  1. Faites une présentation synthétique : Soyez concis (bref) votre réponse doit mettre les textes en relation en fonction des similitudes et/où des différences.

Justifier vos réponses par des citations entre guillemets, accompagnées du n° de lignes auxquelles elles renvoient. Les citations doivent se réduire à des mots ou expressions, inutile de copier des phrases entières. Soyez PRECIS.

  1. Rédiger la phrase de conclusion :

Reprendre les éléments de réponse en montrant que vous avez répondu à la question

Quelques exemples de questions de corpus

Application de la méthode du corpus

Entrainement au commentaire

Commentaire littéraire du texte de Flaubert extrait de Madame Bovary

Outils en téléchargement

  • Rappel méthodologique du commentaire
  • Tableau d’aide au commentaire
  • Correction du commentaire
  • Fiche d’auto évaluation sur le commentaire

La méthode…

Votre commentaire doit être construit comme suit :

Dans l’idéal : 10% de lignes pour l’intro/ 80% de lignes pour le développement (en 2 ou 3 parties à peu près égales) /10% pour la conclusion

Introduction :

a)Présenter le texte (auteur, son oeuvre et mouvement littéraire du texte)

b)Donner le titre de l’œuvre (souligné) et du texte entre guillemets. Présenter l’histoire (résumé) en 2 ou 3 lignes

  1. c) situer le texte (à l’aide du paratexte = ce qui est écrit en haut du texte en italique)
  2. d) problématique explicite : sur quoi allez vous réfléchir ?
  3. e) annonce du plan : Au bac en technologique on vous donne les axes. Utilisez-les !

Le développement

Présentation sur la page (typographie) :

  • Sauter 2 lignes entre introduction et développement
  • Sauter 1 ligne entre chaque sous-partie
  • Alinéa en début de paragraphe
  • Commencer chaque partie (I et II) en annoncant le thème de la partie
  • Vos arguments (c’est à dire l’idée que vous défendez à propos du texte doit toujours être accompagnée de citations provenant du texte. C’est la preuve que vous avez pour vous justifier!!! Ne vous contentez pas de N° de ligne . JE VEUX des citations du texte qui arrivent avec logique dans vos phrases pour prouver ce que vous dites sur le texte.

  • Entre chaque partie et chaque sous-partie, faites une transition (c’est à-dire une phrase qui reprend très brièvement l’essentiel de ce que vous venez de dire et qui annonce ce que vous allez dire)

Ne séparez jamais le fond (les idées) de la forme (le style, la manière dont les idées sont dites : figures de style, négation, champ lexical…)

  • Souligner les titres des œuvres
  • Mettre des guillemets chaque fois que vous citez le texte

Dans un commentaire, on analyse la forme pour comprendre le sens (ou l’inverse) mais on ne sépare pas l’un de l’autre. C’est à dire qu’il ne sert à rien de relever le champ lexical de la pluie si vous ne pouvez pas dire pourquoi il y en a un et à quoi il sert dans le texte….

Conclusion :

  1. Récapituler vos 2 (ou 3) grandes parties : une ou deux phrases par partie.
  2. Ouverture : Terminez votre devoir avec un autre texte en similitude (un autre texte du corpus par exemple) ou la citation (qui a un rapport avec le devoir !) d’un auteur…/Ou si vous n’avez vraiment rien d’autre, une considération personnelle sur le texte si elle est réfléchie !

Présentation :

1 bloc pour l’intro

Saut de 2 lignes

1 bloc pour la 1ere question

Saut de 2 lignes

1 bloc pour la 2eme question

Saut de 2 lignes

Conclusion

Vous ferez le commentaire littéraire du texte ci-dessous en vous aidant des axes suivants :

  1. Force réaliste du passage
  2. Entre tragédie et farce (grotesque)

Gustave Flaubert (1821-1880).

Emma, jeune provinciale nourrie de lectures de romans a épousé un médecin de campagne, Charles Bovary. Elle s’ennuie, rêve d’une autre vie, prend des amants et s’endette… Elle finit par s’empoisonner au cyanure.

Cependant elle n’était plus aussi pâle, et son visage avait une expression de sérénité, comme si le sacrement l’eût guérie.

Le prêtre ne manqua point d’en faire l’observation ; il expliqua, même à Bovary que le Seigneur, quelquefois, prolongeait l’existence des personnes lorsqu’il le jugeait convenable pour leur salut ; et Charles se rappela un jour où, ainsi près de mourir, elle avait reçu la communion.
— Il ne fallait peut-être pas se désespérer, pensa-t-il.

En effet, elle regarda tout autour d’elle, lentement, comme quelqu’un qui se réveille d’un songe ; puis, d’une voix distincte, elle demanda son miroir, et elle resta penchée dessus quelque temps, jusqu’au moment où de grosses larmes lui découlèrent des yeux. Alors elle se renversa la tête en poussant un soupir et retomba sur l’oreiller.
Sa poitrine aussitôt se mit à haleter rapidement. La langue tout entière lui sortit hors de la bouche ; ses yeux, en roulant, pâlissaient comme deux globes de lampe qui s’éteignent, à la croire déjà morte, sans l’effrayante accélération de ses côtes, secouées par un souffle furieux, comme si l’âme eût fait des bonds pour se détacher. Félicité s’agenouilla devant le crucifix, et le pharmacien lui-même fléchit un peu les jarrets, tandis que M. Canivet regardait vaguement sur la place. Bournisien s’était remis en prière, la figure inclinée contre le bord de la couche, avec sa longue soutane noire qui traînait derrière lui dans l’appartement. Charles était de l’autre côté, à genoux, les bras étendus vers Emma. Il avait pris ses mains et il les serrait, tressaillant à chaque battement de son cœur, comme au contrecoup d’une ruine qui tombe. À mesure que le râle devenait plus fort, l’ecclésiastique précipitait ses oraisons ; elles se mêlaient aux sanglots étouffés de Bovary, et quelquefois tout semblait disparaître dans le sourd murmure des syllabes latines, qui tintaient comme un glas de cloche.

Tout à coup, on entendit sur le trottoir un bruit de gros sabots, avec le frôlement d’un bâton ; et une voix s’éleva, une voix rauque, qui chantait :

Souvent la chaleur d’un beau jour
Fait rêver fillette à l’amour.


Emma se releva comme un cadavre que l’on galvanise, les cheveux dénoués, la prunelle fixe, béante.
Pour amasser diligemment
Les épis que la faux moissonne,
Ma Nanette va s’inclinant
Vers le sillon qui nous les donne.


— L’Aveugle s’écria-t-elle.

Et Emma se mit à rire, d’un rire atroce, frénétique, désespéré, croyant voir la face hideuse du misérable, qui se dressait dans les ténèbres éternelles comme un épouvantement.

Il souffla bien fort ce jour-là,
Et le jupon court s’envola !


Une convulsion la rabattit sur le matelas. Tous s’approchèrent. Elle n’existait plus.

Flaubert - Madame Bovary - Extrait de la troisième partie, chapitre VIII

Entrainement dissertation

Outils en téléchargement

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  • Tableau d’aide à la dissertation
  • Correction de la dissertation
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Méthode

A vous de faire une fiche méthodologique sur la dissertation à partir des vidéos ci-dessus.

Sujet :

On dit souvent que le roman est le reflet de la société.

Vous discuterez cette affirmation en vous appuyant sur les romans que vous avez étudiés ainsi que sur vos lectures personnelles.

Plan proposé

  1. Le roman, reflet de la société

Romans réalistes et naturalistes cherchent la fidélité dans leur description de la société.

2. Un reflet trompeur parce que subjectif et partial

Le reflet suppose une image parfaite qui ne serait qu’une reproduction fidèle . Mais en réalité le romancier décrit une société qui passe par SON regard.

L’image donnée de la société dans le roman peut être soumise à la subjectivité d’un auteur mais aussi , et à travers lui, d’un personnage. Donc le roman peut être un reflet infidèle, une image déformée de la société.

3. Le roman est davantage une réflexion sur le monde qu’un simple reflet de la société.

Le roman ne se contente pas de refléter la société, il l’analyse et la juge. Même les romans utopiques ou dystopiques totalement fantaisistes, proposent finalement une réflexion sur nos sociétés