Le parcours : récit et Connaissance de soi

Charlotte Salomon, Vie ? ou Théâtre ?

Charlotte Salomon, Vie ? ou Théâtre ?

Charlotte Salomon (1917-1943) est une artiste juive allemande  morte enceinte à l’âge de vingt-six ans à Auschwitz. Elle a  laissé derrière elle plus de 1300 peintures lumineuses réalisées de fin 1940 à mi-1942 pour lutter contre le désespoir.

 Réfugiée près de Nice, Charlotte décide, confrontée à un monde en décomposition, de peindre, d’écrire et de mettre en scène sa vie .Oeuvre unique mais qui allie textes, peintures et musiques. Sous-titrée “Opérette aux trois couleurs”, cet ensemble monumental est réalisé à la gouache, avec les seules trois couleurs primaires. L’artiste calligraphie le récit, les dialogues et les indications musicales sur des calques. Peu avant son arrestation en 1943, elle a confié à un ami proche l’intégralité de son oeuvre en lui disant « Prenez-en soin, c’est toute ma vie ».

Charlotte Salomon, Autoportrait (vers 1940-1942)
Charlotte Salomon, 30 Janvier 1933

Issue d’une famille juive-allemande aisée. Charlotte a 16 ans lorsque Hitler devient chancelier du Reich le 30 janvier  1933.

La mère de Charlotte s’est suicidée lorsqu’elle avait 9 ans et son père s’est remarié quelques années après avec une chanteuse lyrique, Paula Lindberg, avec qui elle eut une relation très forte.

Dés 1936 son père qui avait perdu son droit d’exercer la médecine (puisqu’il était juif) fut interné dans le camp de concentration de Sachsenhausen.Mais il survivra.

Charlotte Salomon, le père

Charlotte commença des études d’art à l’Académie des Beaux-Arts de Berlin. Mais parce qu’elle était juive, elle ne put obtenir  le premier prix qu’elle méritait. Elle aura été la dernière étudiante juive de Beaux-Arts de Berlin.

Début 39, elle se réfugia dans le sud de la France, chez ses grands-parents. Mais le 20 mars 40, sa grand-mère se défenestre sous ses yeux, ne pouvant plus supporter la violence  nazie.  Quelques mois plus tôt son grand père lui avait avoué qu’elle était   la dernière d’une lignée maternelle dont tous les membres, depuis trois générations, s’étaient suicidé. Même sa mère, qui lui avait-on dit – était morte de la grippe en 1926 ,s’était elle aussi jetée dans le vide. Quant à l’origine de son prénom, elle l’avait hérité d’une tante morte noyée avant sa naissance, en 1913.

La mère de Charlotte, qui s'est défenestrée quand elle avait 9 ans, en 1926, lui dit peu avant de mourir: "Au ciel, tout est beaucoup plus beau que sur terre, et, lorsque ta Maman sera devenue un petit ange, elle descendra et apportera à son petit lapin, elle apportera une lettre dans laquelle elle dira comment c’est au ciel, comment c’est tout là-haut dans le ciel."

Charlotte Salomon porteuse d’une bien lourde histoire, exilée dans un pays étranger auprès d’un grand-père aigri et menacé par la guerre et l’antisémitisme va trouver dans la création artistique un moyen de supporter la tragédie qu’est sa vie. 

Entre 1940 et 1942 , elle travailla intensément à son œuvre autobiographique Leben ? Oder Theater ?,(Vie ? ou théâtre ?) et mit  en scène son histoire dans des oeuvres picturales  enrichis de textes . En moins de deux ans elle peindra plus d’un millier de gouaches. Une sorte d’urgence devant la mort qui rode.

 Elle ne travaille qu’ à partir des trois couleurs primaires. Ses oeuvres juxtaposent des calques sur lesquels sont écrits des récits, des dialogues , des annotations musicales.  Sorte de Comédie humaine qui oscille entre comédie et tragédie ou chaque être rencontré devient un personnage. 

 

Oeuvre qui interroge  le sens de la vie et la place et le rôle de l’art. Peu avant sa déportation , elle confiera les gouaches de Leben ? Oder Theater ? à un ami proche avec ces mots : «Gardez- les bien, c’est toute ma vie.»

En 1943, Charlotte et l’homme qu’elle avait épousé peu de temps auparavant sont dénoncés et déportés à Auschwitz où Charlotte, enceinte, sera exterminée très rapidement.ullamcorper mattis, pulvinar dapibus leo.

Oeuvre complète, autant littéraire que picturale, qui se lit comme un roman. Charlotte Salomon y fait le récit de sa vie, et de celle de sa famille, dans une très belle langue (traduction d’Anne Helène Hoog et Michel Roubinet). On y retrouve tous les personnages croisés dans sa vie, qu’elle rebaptise de manière amusante. (sa belle-mère, Paula Lindberg, devient Paulinka BimBam). Ainsi elle transfigure un destin tragique en œuvre mi-profonde mi-légère.  

Son œuvre entrelace les textes et les peintures, en y ajoutant une dimension musicale.  

Les peintures, format presque carré, sont d’une vivacité extraordinaire. Charlotte Salomon alterne les portraits, les scènes de vie, assemblages de scénettes dans un même plan, parfois organisées dans ce qui ressemble à des cases, joue avec les perspectives, les aplats de couleurs, les textures, les échelles, de telle manière que c’est un monde qui s’ouvre aux yeux du spectateur. Une forme d’onirisme, aussi, évoque les tableaux de Chagall.

La calligraphie des textes, tracés en majuscules, à la gouache, sur des calques ou directement sur les peintures, tantôt en lignes bien droites, tantôt formant des courbes, des blocs, composés de caractères de plus ou moins grandes tailles, sont comme des petits êtres vivants animant les tableaux.

 

 

La dimension autobiographique de l’oeuvre. (Cliquez sur L‘OBS )

Vidéo exposition

Charlotte Salomon, Vie ? ou Théâtre ? traduit par Anne Hélène Hoog et Michel Roubinet (Le Tripode – 820 pages -28×28 cm – plus de 1100 reproductions – 4 600 grammes – Relié par une toile – 95€)

Interview video père et belle-mère de Charlotte

Emission sur Charlotte Salomon

David Foenkinos, Charlotte, Ed. Gallimard,

Marjane Satrapi, Persépolis

L’AUTEUR

 

Marjane Satrapi est née en 1969 à Téhéran dans une famille aisée, cultivée et libérale. Elle a vécu les bouleversements politiques des dernières décennies en Iran : fin du régime du Shah, révolution islamique, guerre Iran-Irak.

En 1992, elle part en France, poursuit ses études à l’École supérieure des arts décoratifs de Strasbourg. Elle devient une auteure de bande dessinée à succès. Elle est notamment l’auteur de Persépolis, Broderies (2003) et Poulet aux prunes (2004).
Marjane a dix ans lorsque la révolution éclate, elle habite Téhéran avec ses parents. Elle voit la chute du Shah et l’arrivée au pouvoir des islamistes. A quatorze ans, ses parents l’envoient, pour la protéger au lycée français de Vienne. Elle retourne en Iran finir ses études supérieures puis part s’installer à Strasbourg puis à Paris où elle vit encore.  

Persépolis est une œuvre autobiographique, de Marjane Satrapi au style graphique et narratif très personnel.

Publiée aux éditions L’Association entre 2000 et 2003, la bande dessinée a donné lieu à la production d’un long métrage d’animation, Persepolis, réalisé par Marjane Satrapi et Vincent Paronnaud et sorti en France en 2007.

Synopsis

A Téhéran, en 1978, Marjane, 8 ans, vit dans une famille aux opinions libérales. Très proche de sa grand-mère, elle tente de comprendre les événements et suit la révolution islamique qui se termine par la chute du régime du Chah. Tout change pour elle et pour sa famille : les commissaires de la révolution contrôlent les codes vestimentaires et établissent une liste des comportements autorisés. Marjane est obligée de porter le voile et s’imagine un destin de révolutionnaire. D’autres bouleversements tragiques surviennent avec la guerre contre l’Irak. Dans le pays, la répression devient toujours plus sévère. Les années passent. Marjane part en Autriche pour ses études… (source Télérama)

Vous trouverez beaucoup d’infos sur Persépolis 

Dossier proposé part le collège d’Alençon

J.M Basquiat, Autoportraits

En quoi l’autoportrait est-il une forme du récit de soi ?

L’Œuvre à la loupe • Skull de Basquiat

 

SOPHIE CALLE

Sophie Calle, née à Paris le , est une artiste plasticienne, photographe, femme de lettres et réalisatricefrançaise.

Son travail d’artiste consiste à faire de sa vie, et notamment des moments les plus intimes, une œuvre. Pour ce faire, elle utilise tous les supports possibles : livres, photos, vidéos, films, performances, etc.

 source wikipedia

 

 Sophie Calle   

EXTRAIT DU DOSSIER Centre Pompidou sur Sophie Calle 

http://mediation.centrepompidou.fr/education/ressources/ENS-CALLE/ENS-calle.html

Autoportrait
Après avoir suivi cet homme à Venise, Sophie Calle éprouve l’envie d’être elle-même suivie. Elle demande à sa mère d’engager un détective privé.
“Selon mes instructions, dans le courant du mois d’avril 1981, ma mère s’est rendue à l’agence Duluc détectives privés. Elle a demandé qu’on me prenne en filature et a réclamé un compte rendu écrit de mon emploi du temps ainsi qu’une série de photographies à titre de preuves.”
Sophie Calle, A suivre…, Livre IV, Actes Sud, France, 1998

La Filature, 1981 (détail)
Diptyque composé de textes et de photographies n/b, 162 x 110 cm (chacun)

La Filature, commandée en 1981 par le Centre Pompidou pour une exposition consacrée à l’autoportrait, est constituée de mises en scène vécues sur un mode autobiographique.
Récit à double-voix: l’enquête du détective sur une journée de l’artiste suivie de photographies floues est accompagnée de la description de sa journée par Sophie Calle et de photographies du détective prises à son insu par un ami de Sophie C.
“Je suis entrée dans la vie de M. X détective”. Sophie Calle apprécie ses regards, “l’attention qu’il lui porte est telle qu’aucun homme ou femme qui l’a aimée ne lui a jamais donnée…”, écrit-elle.
Objet et voyeur du regardeur, Sophie Calle dresse, grâce à lui, son autoportrait d’un jour.
L’expérience se renouvelle en 2001 lorsque l’artiste réalise Vingt ans après selon l’initiative de son galeriste Emmanuel Perrotin.

Un genre dans un genre: l’autoportrait pose la question du miroir, des points de vue, de la ressemblance; il interroge les rapports à l’espace, au temps. Sophie Calle est suivie une journée à Paris; comme elle aime la peinture de Titien intitulée L’homme au gant, elle reste au Louvre une heure devant le tableau, forçant le détective à en parler dans son rapport. Sophie Calle souhaite une personne interposée pour se portraiturer; le regard de l’autre la révèlerait-elle ? Position et relation complexes: objet et sujet menant l’enquête, personnage et auteur, modèle et créatrice… Sophie Calle brouille les pistes, la confusion des rôles intrigue, l’enquête est une énigme.
Aussi, images et textes ne résultent pas de “professionnels”: le détective, Sophie Calle, son ami ne sont ni photographes, ni écrivains. Le projet et sa réalisation finale, encadrée au mur avec sobriété, ont néanmoins le statut d’œuvre d’art.
Comparons trois artistes utilisant leur image dans leur propre travail photographique: Sophie Calle invente des postures romanesques contemporaines, Cindy Sherman, qu’elle admire, se met en scène dans les postures de certains mythes (le cinéma, la féminité, l’enfance…), enfin, Nan Goldin se découvre dans son milieu, ses relations intimes, partage sa culture lesbienne, gay ou travestie.

En littérature, Dominique Viart, professeur à l’Université de Lille III, pose le problème identitaire de l’écrivain dans l’autoportrait: “Forme de l’écriture de soi, l’autoportrait est l’une des voies d’accès à la complexité du “je”. Mais tout texte littéraire n’est-il pas, au fond, un portrait de son auteur ?”.
Puis, il ajoute: “Ecrire “je suis”, c’est commencer à se dire autre que soi, à dire l’autre que l’on porte en soi. […] l’individu ne constitue son identité que par le truchement de médiations. “Il y a de l’autre en moi” continuent d’affirmer les écrivains à la suite de la formule radicale de Rimbaud “Je est un autre”. “
TDC n° 853, L’autoportrait, avril 2003

Voir aussi :