Analyse du texte
I. Tension entre les deux univers (SS/Déportés)
- a. Négation de l’Autre par les SS- Volonté d’anéantissement
- Pour SS : Déportés ne sont pas des hommes, n’appartiennent pas à humanité ;c’est uniquement leur utilité qui intéresse les SS
Justification : nommés par des synecdoques : “vestes rayées”; “mains captives”
- De nombreuses négations dans le texte montre cette volonté de refuser l’existence à ses êtres
Justification “il ne faut pas que tu sois” (x2)On ne siat même pas qui le dit. pas de locuteur ; « il faut » verbe impersonnel encore plus inhumain
- L‘objectif est de les anéantir : Cruauté et horreur de la déportation: une machine de mort
Justification champ lexical crémation,(four, “brûler”, cendres”… Indicatif : certitude des faits. ne peuvent être niés/Futur antérieur “Ils auront brûlé des enfants, ils l’auront voulu” : acte volontaire,cruauté délibérée responsabilité../ Accumulation de mots au pluriel qui suggèrent l’univers des camps, bruyant, déshumanisé, grouillant…”aboiements de milliers de SS; fours, chiens, barbelés, poux…
- Projet dément, démesuré (la solution finale)Description de l’enfer…
Justification : champ lexical de la quantité, de l’énorme : “”machine énorme” “tonnes de cendres “peuvent peser par tonnes”
- Cet objectif gigantesque et inimaginable s’oppose à sa cause : “une dérisoire volonté de con” Il y a un déséquilibre effrayant entre l’effet et la cause.on ne sait même plus s’il y a encore des hommes dans cette entreprise terrifiante :
Justification “une machine énorme a été montée” : voix passive du verbe. Ou sont les hommes ? il n’y a pas de sujet . Alors qui fait l’action?
B. Exister quand même
- SS ne peuvent modifier l’espèce humaine
Justification”Le règne de l’homme, agissant ou signifiant, ne cesse pas” (particie présent)
- SS ne peuvent pas décider pour l’autre qu’il n’existe pas, qu’il n’est pas humain
Justification : « peuvent pas décider, à la place de celui qui sera cendre tout à l’heure, qu’il n’est pas ». A “il ne faut pas que tu sois” s’oppose”MAIS ils NE PEUVENT pas décider”.
- Aussi puissant qu’ils soient ou qu’ils se pensent, voler, oter son humanité à un homme n’est pas en leur pouvoir. ils ne peuvent rien contre la loi générale et irréversible de la nature selon laquelle tous les hommes sont… des hommes, quelle que soit la barbarie subie ou infligée.
Justification “Le règne de l’homme ne cesse pas » qui renforce l’expression de l’impuissance des SS
- Rien ne leur garantie qu’ils arrivent à leur fin, qu’ils peuvent nier cette humanité Justification : Les SS peuvent se trouver « entièrement volés» (l.12) si, au moment même de leur mort, les détenus gardent leur certitude d’être hommes. Le choix de la voix passive met aussi en évidence leur impuissance.
C. Même vision de l’autre
- Déportés assimilent les SS à des machines, des robots : eux non plus ne sont pas perçus comme humains…
Justification :Synecdoque aussi pour eux qui sont “des yeux morts”/”une voix qui commande”
- Ils sont sans âme: ce sont des machines à donner des ordres qui obeissent à une machine qui n’est commandée par personne…((voir au-dessus) Eux aussi sont enfermés dans l’espèce humaine, et eux aussi sont mortels…Mais ils n’auront pas la même place que les victimes /
Justification: « l’histoire qui doit faire plus fécondes ces cendres sèches que le gras squelette du Lagerführer”
- Dans le temps, ils ne sont pas plus puissants que les déportés, ils passeront eux aussi..
Justification : « Ils sont une puissance comme l’homme qui marche sur la route en est une. Et comme nous. » L’équivalence entre les SS et « l’homme qui marche sur la route » tend à les mettre au même niveau que tous les passants de ‘histoire
- Les détenus sont tout autant une force que les déportés.
Justification : Ils peuvent décider « d’être » avec « acharnement » (l.10) contre la volonté des SS, cela « dépend encore » d’eux (l. 10). Cette puissance dépasse même celle des SS, comme le soulignent l’antithèse entre le verbe et le nom « pouvoir » dans la phrase : « Ils ne peuvent pas nous empêcher d’exercer notre pouvoir » (l.20)
II. Un hommage à l’humanité et à la résistance
- A. Hommage au rhénan
- Il incarne symboliquement et concrètement l’humanité.
Justification : Représenter par pronom “il” au singulier qui s’oppose au “ils” pluriel pour les SS
- Il a une identité propre, une singularité/ il n’est pas une machine. « le Rhénan », un individu au singulier, qui prend des initiatives qui lui sont propres.
Justification : Les 16 occurrences du « il » marque la place particulière de cet homme qui a su se désolidariser .
- le Rhénan ne supporte plus d’être assimilé à la machine de mort SS, Ne veut pas être considéré comme « des yeux morts » et « une voix qui command[e] premier acte de résistance du Rhénanson audace et son courage sont soulignés :
Justification : il a osé dire « langsam » aux détenus, ce qui « suffisait à l’envoyer dans un camp ». La répétition du verbe « faire » dans l’expression « faire ce que le Rhénan a fait », et l’expression « révolte décidée contre tout l’ordre SS » soulignent aussi son courage
- la brièveté des phrases l.24-25 aide à mieux imaginer ce geste furtif qui ne doit être vu de personne
Justification : « Il nous a tendu la main (…) On l’a serrée. Quelqu’un venait, on l’a retirée». Le champ lexical de la clandestinité, composé par les termes « complices » (l.35), « geste secret, solitaire » (l. 44), « les voies mêmes, étroites, clandestines », vient renforcer cette impression. L’interdiction est qualifiée d’ « énorme » l.56 ;
B. Le geste du Rhenan : Un symbole de communion face à l’oppression
- Réciprocité du geste
Justification : « Il nous a tendu la main. (…) On l’a serrée », montre une union voulue des deux côtés. Emploi du “nous”: seul allemand associé aux déportés
- union voulue des deux côtés.
Justification : Ils sont « devenus complices » (l.35)
- rapprochement physique :
Justification :L’adverbe intensif « tout » dans l’expression « nous étions tout près de lui » (l.30) insiste d’ailleurs bien sur le rapprochement des trois personnes
L’emploi du « nous : « Nous étions devenus complices » seul « nous » du texte qui associe à des détenus un Allemand. Les autres Allemands sont toujours désignés par « ils » à valeur de rejet.
- La portée de cette poignée de mains est amplifiée par l’antithèse entre l’accumulation évoquant les humiliations et les cruautés infligées par les SS et le geste du Rhénan qui les réduit à néant : « Les aboiements de milliers de SS ne pouvaient rien, ni tout l’appareil des fours, des chiens, des barbelés, ni la famine, ni les poux, contre ce serrement de main » (l. 38-40). (le singulier plus fort que le pluriel). L’antithèse oppose d’une part l’inhumanité des SS – ici animalisés - à l’humanité du Rhénan et des détenus, et d’autre part l’importance des moyens déployés par les SS pour anéantir les détenus et le résultat obtenu (« rien »).
- Plus largement, le contraste entre la brièveté de l’événement et la place que le narrateur lui accorde dans son récit suffit à prouver l’importance qu’il revêt à ses yeux.
C. Un geste politique
- Un geste aussi fort que toute la barbarie nazie
Justfication :l’antithèse entre l’accumulation des groupes nominaux évoquant les humiliations et les cruautés infligées par les SS (noter aussi l’accumulation de la conjonction « ni »), et le geste du Rhénan qui les réduit à néant : « Les aboiements de milliers de SS ne pouvaient rien, ni tout l’appareil des fours, des chiens, des barbelés, ni la famine, ni les poux, contre ce serrement de main »
- ce geste pour Antelme perdu tout caractère privé et a pris la valeur d’un geste politique, comme en témoigne la gradation sémantique (l. 44 à 51) : ce « geste secret » prend la valeur plus large de « tout rapport humain, d’un Allemand à l’un de nous » pour devenir « le signe même d’une révolte décidée contre tout l’ordre SS ». Ce geste est bien plus qu’un geste : c’est « agir en homme », « se classer historiquement » (l. 50), c’est-à-dire choisir son camp.