LIRE & ANALYSER UN TEXTE POETIQUE
Les connaissances de base sur le genre poétique.
Chaque genre possède ses spécificités. Mais dans un même genre, il y a de grandes différences.
Ce qui caractérise le genre poétique :
La poésie est avant tout un travail sur les mots, sur le langage.
La forme est très importante en poésie, parfois même elle prend le pas sur le fond (le sens).
- Les différences prose/ poésie:
La prose
Dans la vie quotidienne, nous utilisons la prose. C’est une façon naturelle de s’exprimer, sans autres règles que celles qui nous permettent d’être clairement compris des autres, à l’écrit comme à l’oral.
Les romans sont écrits en prose (Du moins aujourd’hui).
Le théâtre classique ou romantique était en vers mais le théâtre contemporain est en prose et reprend le langage oral de tout un chacun. Dans la prose, donc, pas de rime, pas de vers.
Toutefois certains poètes utilisent la prose dans leurs poèmes. Ainsi en est-il du recueil de Charles Baudelaire Petits poèmes en prose (1869).
Voici «Le Port», poème extrait de ce recueil :
«Un port est un séjour charmant pour une âme fatiguée des luttes de la vie. L’ampleur du ciel, l’architecture mobile des nuages, les colorations changeantes de la mer, le scintillement des phares, sont un prisme merveilleusement propre à amuser les yeux sans jamais les lasser. Les formes élancées des navires, au gréement compliqué, auxquels la houle imprime des oscillations harmonieuses, servent à entretenir dans l’âme le goût du rhythme et de la beauté. Et puis, surtout, il y a une sorte de plaisir mystérieux et aristocratique pour celui qui n’a plus ni curiosité ni ambition, à contempler, couché dans le belvédère ou accoudé sur le môle, tous ces mouvements de ceux qui partent et de ceux qui reviennent, de ceux qui ont encore la force de vouloir, le désir de voyager ou de s’enrichir.»
Qu’est-ce qui caractérise la poésie en prose ?
- Généralement le texte en prose forme un tout, un peu comme un tableau (d’ailleurs il est souvent descriptifs).
- Il faut observer son titre, sa construction, notamment répétitions et anaphores.
- Des figures de style liées aux images : métaphores, comparaisons, personnifications, allégories…
- Des jeux de sonorités : assonances, allitérations…
- Des antépositions de l’adjectif.…
Reconnaitre le type de :
Poèmes :
Sonnet, Elégie, ballade, blason, ode…
Formes fixes :
Le sonnet : c’est la plus célèbre et la plus usitée des formes fixes. Venu d’Italie à la Renaissance, mis en avant par les poètes de La Pléiade, il retrouve une place de choix au XIX° notamment avec Baudelaire.
Constitué de 14 vers répartis en 2 quatrains et 2 tercets .
On distingue sonnet italien :(XVI°)
5 rimes,
ABBA/ABBA/CCD/EDE
Et sonnet français : ABBA/ABBA/CCD/EDE (XIXème )
La plupart du temps en alexandrins.
Strophes :
Monostique (1 vers), Distique (2 vers), tercet (3 vers), quatrain (4 vers), quintil (5 vers) sizain(6 vers), septain (7 vers),huitain (8 vers), neuvain (9 vers), dizain (10 vers)…
Le vers : (Au moins jusqu’au début du XX°)
Il est très codifié.
Il a un nombre de syllabes déterminé (alexandrin, heptamètre…).
Il se termine par des rimes, elles-mêmes très codifiées
Le rythme des phrases, les sonorités y jouent un grand rôle.
Voici un sonnet extrait des Fleurs du Mal (1859) de Charles Baudelaire :
Contemple-les, mon âme ; ils sont vraiment affreux !
Pareils aux mannequins, vaguement ridicules ;
Terribles, singuliers comme les somnambules,
Dardant on ne sait où leurs globes ténébreux.
Leurs yeux, d’où la divine étincelle est partie,
Comme s’ils regardaient au loin, restent levés
Au ciel ; on ne les voit jamais vers les pavés
Pencher rêveusement leur tête appesantie.
Ils traversent ainsi le noir illimité,
Ce frère du silence éternel. Ô cité !
Pendant qu’autour de nous tu chantes, ris et beugles,
Eprise du plaisir jusqu’à l’atrocité,
Vois, je me traîne aussi ! mais, plus qu’eux hébété,
Je dis : Que cherchent-ils au Ciel, tous ces aveugles ?
Vers :
Alexandrin : 12 syllabes
Hendécasyllabe : 11 syllabes
Décasyllabe : 10 syllabes
Ennéasyllabe : 9 syllabes
Octosyllabe : 8 syllabes
Heptasyllabe : 7 syllabes
Hexasyllabe : 6 syllabes
Pentasyllabe : 5 syllabes
Tetrasyllabe: 4 syllabes
Trisyllabe : 3 syllabes
Disyllabe : 2 syllabes
Monosyllabe : 1 syllabe
Le vers libre
Depuis la fin du XIXème : vers irréguliers n’obéissant à aucune contrainte .
Vers pairs
L’alexandrin s’impose dans la « grande poésie » au XVIIe siècle (classicisme).
Le décasyllabe ( 10 syllabes) et l’octosyllabe ( 8 syllabes), fréquent dans la littérature médiévale, puis réutilisés après l’époque classique.
Vers impairs
5, 7, 9, 11 ou 13 syllabes. Appréciés fin du XIXe siècle. Verlaine en fait l’éloge dans son Art poétique.
Attention pour compter les syllabes :
Le « e » :
Le –e- ne se prononce que s’il est suivi d’une consonne. Il ne se prononce donc pas devant une voyelle et en fin de vers.
« J’ai rêvé dans la grott(e) où nage la sirèn(e) ». El desdichado », Nerval
***
La diérèse :
Consiste à prononcer séparément deux sons habituellement groupés .
Par exemple : Li/on au lieu de Lion.
« Les sanglots longs
Des violons (des vi-o-lons)
De l’automne » Verlaine
Procédé de mise en relief
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La synérèse :
Consiste à prononcer en une seule syllabe deux sons habituellement prononcés de manière séparée.
(inverse de la diérèse).
Hier (en une syllabe) au lieu de hi/er..
Rimes :
Plates (suivies): AABB
Croisées: ABAB
Embrassées: ABBA
Masculine : se termine par une autre lettre que «e»
Féminine : se termine par «e»
Pauvre, suffisante ou riche :
Rime pauvre : un seul son commun : Beau/eau
Rime suffisante : deux sons communs : été/chanté (é+t)
Rime riche : plus de deux sons : Pari/mariRime léonine : quatre sons ou plus : ensemble/ressemble) ».
Repérer la place des mots dans le vers :
Début, fin, milieu… Pourquoi ? Quel effet ?
Les enjambements : La phrase se poursuit sans pause au vers suivant.
« Souvent, pour s’amuser, les hommes d’équipage/ Prennent des albatros, vastes oiseaux des mers ».***
Les rejets : quand une phrase ou une proposition se termine au début du vers suivant. Le vers ne se poursuit que par un ou deux mots.
Le Loup, par ce discours flatté,
S’approcha. Mais sa vanité lui
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Les contre-rejets :Quand une phrase ou une proposition commence à la fin d’un vers et se prolonge au vers suivant .
Mise en relief du début.
Après quelques moments, l’appétit vint : l’Oiseau,
S’approchant du bord, vit sur l’eau
Reconnaitre le registre :
Lyrique :
Tragique :
Comique :
Repérer les principales figures de style :
Anaphore :
répétition des mêmes mots à la même place
Il y aura des fleurs tant que vous en voudrez
Il y aura des fleurs couleur de l’avenir
Il y aura des fleurs lorsque vous reviendrez.
Louis Aragon, Le musée Grévin
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Métaphore :
Création d’une image sans outils de comparaison.
Cette faucille d’or dans le champ des étoiles. (Hugo)
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Comparaison :
Utilise des outils comme « pareil à », « semblable à », « tel », »comme »…
Le poète est semblable au Prince des nuées
Qui hante la tempête et se rit de l’archer. (Baudelaire)
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Personnification :
Donner à des inanimés des caractéristiques propres à l’humain.
Un soir j’ai assis la Beauté sur mes genoux. – Et je l’ai trouvée amère. – Et je l’ai insultée. (Rimbaud)
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Hyperbole :
Consiste à exprimer de façon exagérée une idée ou un sentiment.
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Oxymore : L’oxymore associe deux termes qui s’excluent ordinairement, afin de concilier leur sens. Il souligne l’apparence paradoxale du propos. “Cette obscure clarté qui tombe des étoiles.”
Chiasme : construction « en croix ». Consiste à inverser l’ordre des termes dans les deux membres de phrase « il faut manger pour vivre et non pas vivre pour manger »
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Métonymie : Consiste à désigner un objet, une idée ou un être par un autre mot qui lui est associé dans la langue ou dans la réalité.Boire une bouteille ou boire un verre. (L’expression désigne le contenant au lieu du contenu.)
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Synecdoque : Métonymie particulière qui consiste à désigner un objet par une partie de celui-ci ou à évoquer un ensemble par un seul de ses éléments. Elle établit un rapport d’inclusion entre deux termes. “Ni les voiles au loin descendant vers Harfleur. » La synecdoque désigne une partie (les voiles) pour un tout (le bateau).
Repérer les rythmes des vers/ des phrases :
Binaire:
Ternaire :
Autre :
Repérer les sonorités :
Allitérations : Répétition de sonorités consonantiques (consonnes) à l’intérieur d’un même groupe de mots. “Pour qui sont ces serpents qui sifflent sur nos têtes ? » Racine, Phèdre
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Assonances : Répétition de sonorités vocaliques (voyelles) à l’intérieur d’un même groupe de mots. “C’était à Mégara, faubourg de Carthage, dans les jardins d’Hamilcar. » (Gustave Flaubert, Salammbô, 1862.)
Repérer les éléments du lexique :
Champs lexicaux : ensemble de mots ayant la même thématique (la mort, la pluie, l’amour…)
Néologismes : création de mots nouveaux
Niveau de langue :
Mots rares / Mots vulgaires…:
Constructions de phrases :
Longues , courtes , absence de ponctuation, négations …
MAIS ATTENTION ! CES REPERAGES DE FORMES N’ONT DE SENS QUE SI VOUS POUVEZ LES LIER AU SENS DU TEXTE.
Si le poète emploie un vocabulaire lié à la beauté ou à la violence, c’est volontairement. Donc, toujours se demander «pourquoi ce choix ?», «En quoi le choix de la forme joue sur le sens, le renforce ?». Si un mot Bref ! Toujours se demander l’effet produit par le choix d’écriture.