Mallarmé, Brise marine, 1865
Introduction
(cette intro est trop longue pour l’oral mais j’ai préféré en mettre plus pour que vous ayez toutes les infos sous les yeux)
Mallarmé, Prince des poètes[1] , admirateur de Baudelaire et d’Edgar Poe publie ses premiers poèmes en 1862. Il est alors âgé de 20 ans. En 1863, il devient professeur d’anglais (langue qu’il avait apprise pour mieux connaître et lire Poe). C’est entre 1863 et 1866, alors qu’il enseigne en province, qu’il rédige ses poèmes les plus connus parmi lesquels, Brise marine, L’Azur, Les Fleurs, et une première version de L’Après-midi d’un faune…Nommé à Paris à partir de 1871, Mallarmé fréquente les milieux artistiques, et se lie d’amitié avec le peintre Édouard Manet et le milieu impressionniste.
Il est bientôt considéré comme le représentant et le maitre de la poésie symboliste, poésie initiée par Baudelaire et fondée sur le symbole et l’analogie. Le mouvement symboliste rejette le réalisme et le naturalisme et cherche à exprimer l’Idée abstraite par un jeu de symboles : “Je dis: une fleur! et, (…) musicalement se lève, idée même et suave, l’absente de tous bouquets.” (Mallarmé). En 1892, il succède à Verlaine comme Prince des poètes*. Son appartement devient un lieu où se côtoient les représentants des milieux littéraires et artistiques. Il meurt brutalement en 1898 après avoir publié Un coup de dés. Il laisse une œuvre complexe, souvent obscure, au langage inédit, aux mots rares et à la syntaxe déconstruite.
Le poème Brise marine est un poème de jeunesse (Mallarmé n’a alors que 23 ans). Il résonne de fortes influences baudelairiennes, notamment le thème du voyage et de l’ennui. Mais cette œuvre de jeunesse traduit surtout l’impossible quête de l’absolu qui hanta Mallarmé toute sa vie.Dans notre analyse, nous tenterons de montrer comment le voyage se fait métaphore de la création poétique. Pour ce faire nous nous intéresserons d’abord aux raisons du départ, à la force de l’appel. Enfin au pouvoir évocateur du langage poétique.
[1] Prince des poètes : au dix-neuvième siècle, en France : Élu pas ses pairs, le Prince des poètes était nommé à vie et une pension lui était versée. Parmi les plus célèbres Charles-Marie-René Leconte de Lisle (1818 – 1894) Paul Verlaine (1844 – 1896) Stéphane Mallarmé (1842 – 1898) Jules Supervielle (1884 – 1960) Jean Cocteau (1889 – 1963)
LE TEXTE :
La chair est triste, hélas ! et j’ai lu tous les livres.
Fuir ! là-bas fuir! Je sens que des oiseaux sont ivres
D’être parmi l’écume inconnue et les cieux !
Rien, ni les vieux jardins reflétés par les yeux
Ne retiendra ce coeur qui dans la mer se trempe
Ô nuits ! ni la clarté déserte de ma lampe
Sur le vide papier que la blancheur défend
Et ni la jeune femme allaitant son enfant.
Je partirai ! Steamer balançant ta mâture,
Lève l’ancre pour une exotique nature !
Un Ennui, désolé par les cruels espoirs,
Croit encore à l’adieu suprême des mouchoirs !
Et, peut-être, les mâts, invitant les orages,
Sont-ils de ceux qu’un vent penche sur les naufrages
Perdus, sans mâts, sans mâts, ni fertiles îlots
Mais, ô mon coeur, entends le chant des matelots !