Littérature d’idées: Docs. complémentaires

Cannibalisme

Anthropophagie

L’anthropophagie (du grec ἄνθρωπος / anthrôpos, « être humain », et φαγία / phagía qui se rapporte à l’action de « consommer ») est une pratique qui consiste à consommer de la chair humaine. Il s’agit d’une forme de cannibalisme mais qui concerne exclusivement l’espèce humaine. On distingue l’endocannibalisme funéraire, qui consiste à manger les membres de son groupe humain, et l’exocannibalisme guerrier, qui consiste à manger des membres d’un autre groupe humain.(Wikipedia)

cannibale, cannibalisme

source : herodote.net

Le 4 novembre 1492, tandis qu’il explore les Antilles, Christophe Colomb écrit dans son journal de bord qu’il existerait dans les îles voisines des hommes avec un museau de chien (« cynocéphales »), qui mangeraient de la chair humaine. Ces fantaisies lui sont suggérées par la lecture d’Imago Mundi, un célèbre ouvrage de cosmographie médiévale.

Les contemporains de Colomb font le rapprochement entre ces Cynocéphales anthropophages imaginaires et les redoutables Cariba ou Caraïbes (d’un mot amérindien qui veut dire « hardi ») qui vivent dans certaines îles des Antilles. Du coup, par déformation phonétique, le nom de ces derniers va devenir un mot commun pour désigner les mangeurs de chair humaine : les cannibales.

À la fin du siècle suivant, le cannibalisme est évoqué par Jean de Léri, un protestant qui a participé à une tentative de colonisation française dans la baie de Rio (Brésil) et observé les pratiques cannibales des Indiens locaux, accoutumés à rôtir leurs prisonniers de guerre pour s’en approprier les qualités.

En 1573, réfugié à Sancerre pendant les guerres de religion, il voit des parents réduits à la famine se résoudre à manger le cadavre de leur enfant. Cela le décide à écrire le récit de son voyage au Brésil, quinze ans plus tôt. Il en profite pour comparer ce cannibalisme ultra-violent et celui, très ritualisé, qu’il a observé chez les Indiens Tupi. À la même époque, Montaigne, qui s’est informé sur les mœurs des Amérindiens par l’intermédiaire d’un domestique qui a vécu au Nouveau Monde, écrit des pages remarquables sous le titre Des cannibales : « Chacun appelle barbarie ce qui n’est pas de son usage ». Le débat demeure actuel…

Aujourd’hui, des préhistoriens et anthropologues comme Marylène Patou-Mathis considèrent que toutes les sociétés de chasseurs-cueilleurs ont connu l’anthropophagie rituelle à un moment ou un autre. Il s’agit même de la plus ancienne trace de violence répertoriée. Les premiers cas de cannibalisme ont été identifiés sur des ossements de Néandertaliens d’il y a 78 000 ans, retrouvés à la Gran Dolina, Sierra d’Atapuerca (Espagne). On ne sait pas toutefois si les victimes ont été tuées pour être mangées ni si elles appartenaient au même clan que les « consommateurs » (endocannibalisme) ou à un clan adverse.

Avec l’apparition de l’agriculture, les sacrifices humains ont la plupart du temps été remplacés par les sacrifices d’animaux domestiques.

les Tupinamba

Soleil vert, Fleisher, 1974 🤮

En 2022, les hommes ont épuisé les ressources naturelles. Seul le soleil vert, sorte de pastille, parvient à nourrir une population miséreuse qui ne sait pas comment créer de tels aliments. Omniprésente et terriblement répressive, la police assure l’ordre. Accompagné de son fidèle ami, un policier va découvrir, au péril de sa vie, l’effroyable réalité de cette société inhumaine.

Mythe du bon sauvage

Avec les grandes découvertes de la fin du XV°(L’Amérique par Colomb en 1492, Les Indes par Vasco de Gama les Indes en 1497,ou le Canada par Magellan en 1519), l’Europe découvrent d’autres peuples et donc d’autres cultures, d’autres façons de vivre.

Le XVIIIe siècle, avec les récits de voyages de Bougainville, Cook et de bien d’autres continuent à propager l’image du « bon sauvage », symbole d’un paradis perdu. Mais cette représentation relève du « mythe » au sens étymologique, soit une fable, une légende, comme le souligne Rousseau dans la préface de son Discours sur l’origine des inégalités : « …un état qui n’existe plus, qui n’a peut-être jamais existé, qui probablement n’existera jamais… ».

Le changement de perspective lié au voyage permet aux humanistes et aux philosophes de critiquer notre société.

Il est le moyen de se libérer des préjugés, du poids de la Tradition et de l’Autorité .Déjà présente chez Montaigne cette idée va être exploitée par les philosophes : sous un regard neuf . Celui de” candide “, ou de ” L’ingénu ” ou encore des Persans de Montesquieu, (Les Lettres Persanes) nos coutumes montrent soudain leur arbitraire et leur ridicule .

Dans ces récits de voyage réels ou fictifs s’exerce l’ironie à l’égard de notre religion, de nos mœurs et se découvrent aussi nos propres fantasmes comme la fascination des voyageurs occidentaux pour la liberté supposée des mœurs qu’ils découvrent : C’est le mythe du bon sauvage

Vidéo BNF

Montaigne (1533-1592) et le mythe du bon sauvage

La création du mythe du « bon sauvage » est souvent attribuée à Michel de Montaigne même si les fondations de ce mythe sont bien antérieures. Montaigne aborde le sujet dans les chapitres Des Cannibales et Des Coches de ses Essais.

Montaigne souligne l’importance de choisir la raison par rapport à la voix commune et introduit le principe de relativisme culturel ainsi que l’idée de tolérance.

En comparant les Européens au peuple Tupinamba du Brésil dans Des Cannibales, Montaigne essaie de montrer la « barbarie » de l’action destructrice des Européens.

Montaigne est l’un des premiers à inciter les voyageurs à ne pas rester ” couverts et resserrés “, à s’ouvrir au ” plaisir de la variété ” et surtout à découvrir que ” chaque usage a sa raison “ Cette affirmation , plus largement développée dans le chapitre Des Coches ouvre la voie à la réflexion moderne sur ” la relativité des cultures “.

Rousseau (1712-1778) et le mythe du bon sauvage

Dans ses essais philosophiques Discours sur les sciences et les arts (1750) et Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes (1755), Rousseau fait l’hypothèse que l’homme est naturellement bon dans l’état primitif, qu’il ignore le mal.

C’est avec la naissance de la propriété que nait le malheur de l’homme puisqu’il s’éloigne alors d’un paradis possible auprès de la Nature.

“le principe de toute morale (…) est que l’homme est un être naturellement bon, aimant la justice et l’ordre ; qu’il n’y a point de perversité originelle dans le cœur humain, et que les premiers mouvements de la nature sont toujours droits” (…) tous les vices qu’on impute au cœur humain ne lui sont point naturels (…) par l’altération successive de leur bonté originelle, les hommes deviennent enfin ce qu’ils sont.

L’hypothèse du bon sauvage permettra de rappeler aux hommes que plus ils s’éloignent de la simplicité de la vie naturelle, plus ils courent à leur perte.

Pour Rousseau « La nature a fait l’homme heureux et bon, mais la société le déprave et le rend misérable. »

Diderot et le mythe du bon sauvage

Dans le texte Supplément au voyage de Bougainville, paru en 1772, Denis Diderot exprime une position nouvelle, eaucoiup plus nuancée : pour lui, le « bon sauvage » n’existe pas. Il faut juger chaque homme tel qu’il est. Diderot déclare que la nature et les « sauvages » ne sont ni bons, ni mauvais.

Ces prétendus sauvages sont des individus réels qui vivent dans une société différente, ayant leur propre culture.

Diderot utilise ce mythe non pas pour proposer un modèle idéal, mais pour dénoncer les corruptions et les erreurs des colonisateurs de la civilisation européenne et de la religion chrétienne. C’est une réflexion sur sur l’organisation des sociétés, et le caractère universel de la morale.

Le bon sauvage dans la littérature (quelques exemples)

Montaigne (1533-1592)

Les Essais, Des Cannibales, 1580

Daniel Defoe (1660-1731)

Robinson Crusoe, 1717

Montesquieu (1689 - 1755)

Les Lettres persanes, 1725

Marivaux (1688 -1763)

L’Ile des esclaves, 1725

Voltaire (1694 - 1778)

Candide (1752), L’Ingenu (17…

Rousseau (1712 - 1778)

La Nouvelle Heloise, 1762

Denis Diderot (1713-1784)

Supplément au voyage de Bougainnville 1772

James Fennimore Cooper (1901-1961)

Le dernier des Mohicans 1826

Bernardin de St-Pierre (1737-1814)

Paul et Virginie, 1788

Aldous Huxley (1894-1963)

Le Meilleur des mondes, 1932

Ethnocentrisme & Relativisme

Ethnocentrisme

Il n’y a pas une culture mais des cultures. Et l’homme a bien du mal à considérer que celui qui ne vit pas comme lui, est néanmoins un homme d’une égale importance.

Entre relativisme absolu et ethnocentrisme, où se situer ?

Ethnocentrisme

Etymologie de « ethnocentrisme »: du grec ethnos, nation, tribu, et du latin centrum, centre. L’ethnocentrisme consiste à juger les autres cultures en fonction de la notre. Il correspond aux différentes formes que prend le refus de la diversité des cultures. Donc un ensemble de représentations, de croyances, de savoir-faire, de coutumes acquis en tant que membre de telle ou telle société, de telle ou telle communauté et non en tant que membre de l’espèce humaine. On parlera donc de culture occidentale, africaine, orientale…

Texte 1 & 2 : Claude LEVI Strauss, Race et Histoire

Documents complémentaires à télécharger

Doc.2

La controverse de Valladolid

Tous les hommes sont-ils des hommes ?

En 1550, soixante ans après la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, le roi d’Espagne, Charles-Quint, convoque une controverse(1) dans un couvent de Valladolid. Une question fondamentale va être débattue : les Indiens du Nouveau-Monde sont-ils des hommes comme les autres ? En conséquence, méritent-ils d’être traités comme des humains ou sont-ils nés pour être soumis ?

En présence d’un légat du pape, le cardinal Roncieri, d’un représentant de Charles-Quint et devant une assemblée attentive, le chanoine Sepulveda et le dominicain Las Casas s’opposent parfois violemment.

Pour Sepulveda, il existe dans le monde des sous catégories d’humains, faites pour être dominées, les Indiens sont nés pour être des esclaves ;

pour Las Casas, les Indiens sont des hommes, « nos frères », créatures de Dieu.

La controverse de Valladolid illustre la position ethnocentrique de l’Europe à l’époque de la Renaissance et des grandes découvertes. Convaincus d’être des nations civilisées, les états d’Europe ont voulu imposer leur vision du monde et de Dieu au Nouveau Monde. Cette controverse illustre ce que disait Edgar Morin, à savoir que nous ne reconnaissons pas à tous les hommes le statut d’homme.

Relativisme culturel

En simplifiant beaucoup, c’est l’idée qu’aucune culture ne peut être dite supérieure à une autre : chaque culture répond, par des moyens différents, à des problèmes différents. C’est l’idée défendue par Levi-Strauss dans Race et Histoire.

Ce relativisme a toutefois des limites dont nous traiterons ensuite.

Filmographie

1492, R Scott, 1992

La Controverse de Valladolid (Complet)

Aguirre ou la colère de Dieu

Au XVIe siècle, une expédition espagnole mandatée par Gonzalo Pizarro part à la recherche de l’Eldorado sous les ordres de Pedro de Ursúa. Lope de Aguirre, l’un de ses lieutenants, illuminé et mégalomane, s’oppose à son autorité. Ses actions pour saboter l’expédition se multiplient. Lorsqu’Ursúa ordonne un arrêt des recherches, Aguirre lance une mutinerie contre lui et impose le « sacre » d’un noble du groupe, Fernando de Guzmán, comme « empereur d’Eldorado ». Il fait exécuter les partisans de l’ancien chef, à l’exception d’Ursúa lui-même qui est épargné par Guzmán. Les hommes restants, sous les ordres d’Aguirre et Guzmán, embarquent à bord d’un radeau et descendent le fleuve dans l’espoir de trouver la cité d’or.

La Reine Margot, P. Chereau, 1993