LE SYMBOLISME

LE SYMBOLISME

Puvis de Chavanne, Le Rêve-1883.

Le symbolisme nait officiellement à la fin du 19ème siècle.Mais il existait en réalité dès le milieu du XIXe siècle avec les poèmes de Baudelaire, notamment .

En 1886 le poète Jean Moréas publie dans Le Figaro un “Manifeste du Symbolisme” et y affirme :la poésie symbolique cherche à vêtir l’Idée d’une forme sensible (…) »

Pour les symbolistes, notre monde est le reflet d’un univers spirituel supérieur. Les symbolistes essaient de traduire cet univers invisible grâce à des images concrètes, des rythmes et des sonorités qui fonctionnent comme des symboles pour décrypter l’invisible. L’écriture symboliste préfère suggérer que nommer ou décrire. Elle est soucieuse de la musique d’un texte, de son harmonie et de son pouvoir évocateur. Il s’agit de suggérer…

“Je dis : une fleur ! et, hors de l’oubli ma voix relègue aucun contour, en tant que quelque chose d’autre que les calices sus, musicalement se lève, idée même et suave, l’absente de tous bouquets. “

Stéphane Mallarmé

Les principes du symbolisme

Le déchiffrement du monde

Pour les symbolistes, le monde sensible (c’est à dire le monde que nous appréhendons par nos sens) n’est qu’une apparence. (Voir Platon)

Et derrière ces apparences se cache un autre monde, une réalité secrète, dont le poète sera le traducteur .

Pour déchiffrer le mystère des choses, le poète symboliste a recours aux symboles et aux images.

On trouve cela déjà chez Baudelaire sensible aux correspondances entre le monde visible et le monde invisible.
Notamment dans le poème « Correspondances » ci-dessous Baudelaire s’appuie sur des synesthésies et des symboles pour déchiffrer le monde.

Charles Baudelaire, Les Fleurs du mal, Correspondances

La Nature est un temple où de vivants piliers
Laissent parfois sortir de confuses paroles ;
L’homme y passe à travers des forêts de symboles
Qui l’observent avec des regards familiers.

Comme de longs échos qui de loin se confondent
Dans une ténébreuse et profonde unité,
Vaste comme la nuit et comme la clarté,
Les parfums, les couleurs et les sons se répondent.

(…)

Les symboles utilisés sont souvent obscurs, ambigus, polysémiques. Les poètes symbolistes ont recours à des mots peu usités, à des néologismes, à des mythes et légendes.

◊ La suggestion

Les symbolistes ne décrivent pas : ils suggèrent.

◊ La musicalité

La musicalité est aussi un moyen de suggérer au lieu de décrire.

En recourant aux vers libre, les poètes symbolistes remplacent les rimes par des assonances et allitérations, créant dans leurs poèmes un réseau de sonorités complexes.

Les symbolistes ont aussi recours aux mythes et aux légendes.

Les allégories (et plus globalement un vocabulaire abstrait initié par une majuscule) est une des marques des auteurs symbolistes.

Dès 1857, Baudelaire utilise des allégories dans Les Fleurs du Mal (« Spleen ») :

– Et de longs corbillards, sans tambours ni musique,

Défilent lentement dans mon âme ; l’Espoir, Vaincu, pleure, et l’Angoisse atroce, despotique, Sur mon crâne incliné plante son drapeau noir.

L’allégorie permet aux poètes de suggérer un monde d’Idées qui se cache derrière le monde sensible.

◊ La synesthésie

La synesthésie consiste à faire correspondre des sensations de nature différente.

Ainsi Baudelaire dans le poème « Correspondances » fait correspondre des parfums à des sensations auditives et visuelles :

« Il est des parfums frais comme des chairs d’enfants, Doux comme les hautbois, verts comme les prairies »

Rimbaud prônait aussi l’« immense et raisonné dérèglement de tous les sens » dans la Lettre à Paul Demeny de 1871.

IV – Principaux auteurs symbolistes

Charles Baudelaire, Les Fleurs du Mal (1857)

Baudelaire ne se situe pas dans le courant symboliste mais il en est l’initiateur, notamment par le 5ème poème des Fleurs du Mal,
« Correspondances » qui présente le monde sensible comme une « forêt de symboles » qu’il convient de déchiffrer :

« La Nature est un temple où de vivants piliers Laissent parfois sortir de confuses paroles ; L’homme y passe à travers des forêts de symboles

Qui l’observent avec des regards familiers »
Pour Baudelaire, le rôle du poète est de décoder les signes pour

parvenir à la compréhension des mystères de l’univers.

Stéphane MALLARME, Poésies (1899)

Stéphane Mallarmé est connu pour sa poésie hermétique, c’est à dire difficile à comprendre.

Mallarmé écrit à propos de la poésie : « Tout chose sacrée et qui veut demeurer sacrée doit s’envelopper de mystère« .

Guillaume APOLLINAIRE, Alcools, 1913
Alcools n’est pas un recueil symboliste car il se situe au carrefour de nombreux courants artistiques.

Mais certains poèmes d’Apollinaire comme « La Chanson du Mal-Aimé », « Les sept épées », « La Maison des morts » , « Merlin et la vieille
femme », « Le larron » ou « Lul de Faltenin » reposent sur un ésotérisme qui réactive la mythologie grecque et germanique, et s’inscrivent ainsi dans une esthétique symboliste.