Biographie de Diderot
Ecrivain et philosophe, Diderot (1713-1784) est une grande figure du mouvement des Lumières. Maitre d’œuvre avec d’Alembert de l’Encyclopédie (rédigée entre 1751 et 1772) Diderot sera toute sa vie confronté à la censure et devra s’exiler pour continuer à publier ses œuvres. Il s’est essayé à peu près à tous les genres : roman, théâtre, critique d’art et bien sûr dialogue philosophique.
Le Supplément au voyage de Bougainville :
En 1771, Bougainville, grand explorateur Français, avait publié Voyage autour du monde dans lequel il relatait son voyage à Tahiti et dans les régions avoisinantes.(Voir texte n°2) Cet ouvrage provoqua un grand engouement des Français pour Tahiti. Diderot voulut apporter un regard critique à la découverte de Bougainville et publia en 1772 un Supplément au voyage de Bougainville dans lequel il fait entendre un autre discours, celui d’un indigène, un chef tahitien qui s’adresse directement à Bougainville.
Analyse du texte
Diderot, Supplément au voyage de Bougainville
Laisse-nous nos moeurs, elles sont plus sages et plus honnêtes que les tiennes. Nous ne voulons point troquer ce que tu appelles notre ignorance contre tes inutiles lumières. Tout ce qui nous est nécessaire et bon nous le possédons. Sommes-nous dignes de mépris parce que nous n’avons pas su nous faire des besoins superflus ? Lorsque nous avons faim, nous avons de quoi manger ; lorsque nous avons froid, nous avons de quoi nous vêtir. Tu es entré dans nos cabanes, qu’y manque-t-il à ton avis ? Poursuis jusqu’où tu voudras ce que tu appelles commodités de la vie, mais permets à des êtres sensés de s’arrêter, lorsqu’ils n’auraient à obtenir de la continuité de leurs pénibles efforts que des biens imaginaires. Si tu nous persuades de franchir l’étroite limite du besoin, quand finirons-nous de travailler, quand jouirons- nous ? Nous avons rendu la somme de nos fatigues annuelles et journalières la moindre qu’il était possible, parce que rien ne nous paraît préférable au repos. Va dans ta contrée t’agiter, te tourmenter tant que tu voudras. Laisse-nous reposer ; ne nous entête ni de tes besoins factices, ni de tes vertus chimériques.